2003
Durée : 15 minutes 30
Pour 2 pianos et 12 voix.
J’ai donné à cette pièce un titre en langue bretonne, une langue presque totalement étrangère à la mienne, et pourtant proche comme un ancêtre oublié. C’est un des nombreux paradoxes que j’ai accumulés dans cette oeuvre liée à l’universelle tentation d’explorer les frontières du désir. En effet, jusque dans son nom de « soleil aveugle » elle évoque l’élan vers la mort comme une manifestation essentielle du désir de vivre. Les textes chantés, lorsqu’il ne s’agit pas de simples onomatopées, sont en partie empruntés à Sappho et à Novalis, qui incarnent deux chemins opposés et convergents vers la Nuit. L’art des sons ne peut abolir le temps qu’en l’accueillant pour le métamorphoser. C’est sur un tel fond commun éminemment paradoxal que se déploie cette musique, qui n’a rien de morbide ni d’accablé, mais qui, au contraire, s’affirme comme une ascension obstinée, et parfois jubilatoire, vers ce soleil qui ne se peut regarder fixement, selon le mot célèbre de La Rochefoucauld.
François-Bernard Mâche