Olivier Messiaen
Messiaen naît dans un univers littéraire : sa mère, Cécile Sauvage, est poétesse, elle écrit en attendant sa naissance L’Âme en bourgeon, recueil que Messiaen jugera déterminant pour sa destinée ; son père, angliciste et intellectuel prolifique, traduit Shakespeare. De sa première enfance, Messiaen retient les montagnes du Dauphiné, où il retournera régulièrement, le théâtre de Shakespeare, et la découverte de Mozart, Gluck, Berlioz et Wagner au travers des partitions d’opéra qu’il demande en cadeau.
Il entre en 1919 au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris, où il étudie l’orgue et l’improvisation, mais aussi le piano et la percussion, le contrepoint et la fugue, l’accompagnement au piano, l’histoire de la musique, la composition. Ses maîtres sont Paul Dukas, Maurice Emmanuel et Marcel Dupré.
Sa carrière d’organiste débute en 1931 : Messiaen est nommé titulaire du grand orgue Cavaillé-Coll de l’Eglise de la Trinité, poste qu’il occupera pendant toute sa vie. Cette activité d’organiste liturgique est motivée par la foi qui occupe une place essentielle dans son univers. Musicien catholique se disant né croyant, toutes les œuvres de Messiaen, religieuses ou non, sont un acte de foi ; les titres de ses œuvres illustrent cet aspect esthétique qui recouvre l’œuvre entier tant qu’il permet de le comprendre, d’Apparition de l’Eglise éternelle aux Éclairs sur l’Au-Delà, en passant par La transfiguration de Notre-Seigneur Jésus-Christ ou les Méditations sur le mystère de la Sainte-Trinité.
Dès 1934 débute l’activité pédagogique de Messiaen : professeur l’École normale de musique et à la Schola Cantorum jusqu’en 1939, il sera nommé en mai 1941 professeur d’harmonie au Conservatoire de Paris ; il y enseignera jusqu’à sa retraite en 1978, devenant en 1947 professeur d’analyse, et professeur de composition en 1966. Son enseignement est célèbre pour avoir attiré successivement plusieurs générations de jeunes compositeurs ayant constitué l’avant-garde européenne et internationale (citons Boulez, Stockhausen, Xenakis, Amy, Tremblay, Grisey, Murail, Lévinas, Reverdy…). Cet appétit de transmission se mesure dans les publications théoriques (Vingt Leçons d’Harmonie, Technique de mon langage musical et le monumental Traité de rythme, de couleur et d’ornithologie) qui présentent les recherches de Messiaen. Ses apports se situent d’une part dans le domaine du rythme (qu’il considère comme la partie primordiale et peut-être essentielle de la musique) à la faveur de son étude de la métrique grecque, des décî-talas hindous et neumes du plain-chant, et d’autre part dans le domaine du langage mélodico-harmonique par l’invention de modes à transpositions limitées et d’accords complexes créant une musique colorée, le son-couleur.
Les années cinquante inaugurent une nouvelle ère dans l’œuvre de Messiaen, marquée par un nouvel ascétisme (Quatre Etudes de rythme, Livre d’orgue) et par l’omniprésence dans son univers compositionnel du monde des oiseaux (Réveil des oiseaux, Oiseaux exotiques, Catalogue d’oiseaux) pour lesquels Messiaen se passionne, développant une véritable science ornithologique, ainsi qu’une virtuosité dans la notation de leurs chants. En 1962, Messiaen se marie avec la pianiste Yvonne Loriod qui aura été sa principale interprète dès le milieu des années 40, et aura suscité une littérature abondante où le piano prend une place essentielle, seul (Vingt Regards sur l’Enfant-Jésus) ou comme soliste dialoguant avec des formations à géométries variables (Trois petites liturgies de la Présence Divine, Turangalîla-Symphonie, Sept Haïkaï, Des canyons aux étoiles…) Son unique opéra, Saint-François d’Assise, créé en 1983, constitue le testament musical de Messiaen, synthèse d’une vie de recherche dans les domaines du rythme, de la couleur et de l’ornithologie et placée sous le signe de la foi catholique.
© Ircam-Centre Pompidou, 2007