Peter Eötvös, né en 1944 à Székelyudvarhely (Transylvanie), enfant prodige admis à l’Académie de Musique de Budapest par Zoltán Kodály à quatorze ans, fut compositeur avant d’être chef d’orchestre, mais il est vrai que sa carrière de compositeur s’est développée plus lentement que celle de chef. Et c’est dans les années 1990 que l’image de Peter Eötvös comme compositeur s’est imposée ; c’est aussi l’époque où il a composé la majeure partie de ses œuvres – une trentaine de partitions à ce jour –, œuvres dont la spiritualité et la concentration permettent de placer leur auteur parmi les compositeurs majeurs de notre époque. La démarche de Peter Eötvös dans ce domaine est marquée par son sens du geste dramatique, et ce n’est pas un hasard si l’une de ses œuvres les plus reconnues est son premier opéra, Trois Soeurs. Mais bien d’autres éléments scéniques existent dans l’ensemble de sa production : pièces radiophoniques (« Now, Miss ! »), vaudevilles (Harakiri), comédies-madrigaux, « performances », et même dans ses partitions pour orchestre, on découvre constamment une pensée dramatique. Lui-même considère que toute sa musique est théâtrale ou cinématographique ; or, ce théâtre musical garde certains éléments archaïques mais, si on le compare au nô ou au kabuki japonais, ou à des rites africains, il est certain qu’il ne place pas l’auditeur dans la rassurante situation de témoin extérieur. C’est peut-être ce langage gestuel, prolongé par un jeu avec l’espace sonore, qui explique ici un élément fondamental, si rare dans la musique contemporaine.

(D’après Zoltán Farkas)